par Zaid Ouchna
Depuis plusieurs décennies, nous autres Imazighen avons lutté sans relâche, durant des décennies l’Amazigh revendique son existence dans la douleur et depuis des décennies nous avons essuyés des humiliations et des disconvenues pour un seul tort : c’est d’être celui que nous avons toujours été sur une terre héritée de nos ancêtres.
Pendant ce temps, nous avons fait des choses, nous avons accompli certes des choses, nous avons raté beaucoup de choses ; mais nous avons compris bien des choses. Nous avons su que la civilisation Amazighe et le peuple Amazigh étaient l’avilit d’une mouvance sectaire, aux origines diverses mais d’idéologie arabo-musulmane depuis près d’un siècle.
Un siècle jalonné et jonché de trahisons, d’assassinats, de mensonges, de trafique d’influence et de xénophobie. C’est elle, la mouvance sectaire, qui avait baptisé Imazighen « Chleuh » au pluriel et au singulier « chelh ». Ce dernier signifie en Arabe : « l’homme dépourvu de ses biens » ou « l’homme mis à nu ». C’est dans le dictionnaire de la langue Arabe ! Une meilleure preuve, que l’Amazigh n’a jamais été pris pour un concitoyen. J’en ai vécu moi-même en tant qu’Amazigh des situations horribles à l’intérieur, comme à l’extérieur du pays ou on présentait Imazighen aux autres comme des paysans des montagnes et des « barbars ». J’ai subit des humiliations de la part des adhérents de cette mouvance sectaire, qui parlent au nom de l’état. Je suis conscient de ma position d’échantillon.
Tout le monde sait que pour faire disparaître une civilisation, il faudrait au préalable anéantir le peuple porteur. Une ignoble formule certes ; mais ici, dans le cas du Maroc du moins, toute la population ou presque était Amazighe. Une donnée qui n’a évidement pas échappé à la mouvance sectaire. Elle savait qu’elle était, et qu’elle est toujours de toute façon, minoritaire. C’est à partir de là qu’elle a toujours inversée le jeu des conceptions connues pour en faire les siennes, qui n’ont d’ailleurs aucune relation avec des pratiques humaines. Ici, elle a fait fi de tout ce qui est Amazigh par des acrobaties haineuses et des rhétoriques sataniques; c'est-à-dire qu’elle commence par le deuxième volet en effaçant de la tablette des citées la civilisation Amazighe. Pour ce qui est du peuple, étant donné la position de majoritaire de ce dernier, elle ne le prendra jamais en tant que concitoyen, mais plutôt comme un antagoniste dans le but de lui être utile en tant que soldat pour mieux servir la cause arabo-musulmane érigée par elle-même au rangs des repères sacrés. Une cause qui mène droit au paradis et c’est prescrit. Cela lui permettrait également de s’accaparer la part du lion des biens du pays sans qu’elle soit un jour appelée au partage équitable des richesses, comme il est régi dans la plupart des nations dignes de ce nom.
Une conjoncture, prouvant si c’est nécessaire, l’inverse de la sordide formule citée plus haut.
Nous ne pouvons malheureusement pas cacher le soleil avec un tamis, car cette conception aussi immonde soit-elle a trouvé preneurs. Mais là ou le bas blesse plus encore, c’est la conséquence méprisante qu’elle a pu drainer en mettant l’Amazigh en général face à un ennemi invisible d’une part et de l’autre en dépensant des budgets colossales de ses propres biens pour s’inscrire dans le registre malheureux des disparus. Un budget énorme, dépensé et étalé sur cent ans, aurait pu plutôt le mettre sur les rails du développement. Il aurait pu le mettre hors du besoin. Un budget qui aurait pu promouvoir le Marocain dans sa diversité. Mais, c’est un budget gâché car l’Amazigh et les valeurs de l’Amazighité restent debout !
Les dates commémoratives sont là pour rappeler à chacun de nous la portée des pratiques peu orthodoxe et la conséquence des dessins de la secte.
En 1908, le système « Makhzen » passe la main pour permettre à la secte de faire alliance avec le diable dans le but de mater le peuple Amazigh et en soumettre le reste.
En 1912, les célèbres accords de la trahison de Fès, ont drainé l’assassinat des milliers d’Amazighs- si ce n’est plus- sur les montagnes, dans l’anonymat et sans aucune impunité.
Pauvres sont les résistants du Rif, de Tizi n zzou, de Baddou, de Saghro, de Souss, d’Ayt Baâmran et autres !
1921-1926, la Guerre du Rif justement. Après la victoire sur les Espagnols à Anoual, le 21 juillet 1921, Abd El-Krim proclame le Rif. Défait en mai 1926 par les armes chimiques et les troupes franco-espagnoles dirigées par Pétain, il sera déporté sur l’île de la Réunion.
Au même moment, la secte envois ses enfants aux grandes écoles orientales au Caire et occidentales à Paris. Des fois avec des surprises notamment le cas de ce jeune fassi : « Mohamed Ben Abd el-Jalil, étudiant marocain d'origine fassie, envoyé à Paris avec une subvention du protectorat pour y suivre des cours, notamment à l'Ecole nationale des langues orientales, vient de se convertir au catholicisme. Sa conversion a revêtu un éclat tout particulier : il fut baptisé par l'archevêque de Paris en personne, puis à l'occasion de sa première communion il aurait reçu du Pape lui-même un missel et un chapelet ».
Les enfants Amazighs eux, continuent d’être arrosés par des bombes aveugles air/sol de l’armée française dans les montagnes et le sud-est.
16 mai 1930, le dahir sultanien nommé "Dahir berbère" par les protégés de la France coloniale.
Pendant ce temps la guerre bat son plein aux monts Saghro et Hamdoun. Les habitants du sud-est fuient leurs bourgs, des hommes, des femmes, des enfants et des vieillards regorgent les montagnes.
1932, Allal elfassi préparait sa licence et militait au Qarawiyin contre les lois d’Izerf en chantant le « llatif » !
Presque le même jour, les Ayt Yaflman perdent deux héros et pas des moindres dans une attaque aérienne au mont Baddou : Iâittw et Oubatteyyou. D’où l’Izli historique :
Rar-i-d Batteyyu d Iâittew a yakal
Unna trid g widdegh yaden awey-t-in
* Rend gorge à Batteyyou et Iâittew oh la terre !
Ote-toi de celui que tu condescendes des autres
1934, Fondation du Comité d’action marocaine (CAM) en novembre par la nouvelle génération dont Allal El-Fassi, Mohammed El-Ouazzani et Ahmed Balafrej.
A la même date, ce qui reste des patriotes des Ait Yaflman descendent de Baddou la mort dans l’âme ; des blessés, des orphelins, des veuves et Zaid Ouskounti avec, regagnent leurs bourgs pillés !
1935, et 1936, Les héritiers des signataires de 1908 reçoivent les consignes. Ils s’organisent dans des oligarchies en un mouvement fasciste appelé : Fityana Qawmi. Leur hymne de Mohamed Tangi intitulé « ya qawmana ! » en est l’illustration de leur intention et de ce qu’ils veulent faire du pays.
Pendant ce temps, Zaid Ouhmad et compagnie infligent une suite de défaites aux goumiers et aux colons français à l’Amdghos aux versant du Sud-est du haut Atlas. Une situation encore qui prouve, si besoin il y a, que la notion de concitoyenneté ici, n’est pas de mise. La trahison si !
1939. Sidi Mohammed appelle les Marocains à soutenir la France en guerre. L’histoire nous apprendra par la suite que les Imazighen ont libéré Marseille !
1943 Le Caire, la Santa Barbara de l’idéologie arabo-musulmane, abrite une rencontre du panarabisme. On y invente la carte à jouer de « légitimité ». Un peu plus tard au Maroc, la mouvance change du nom et devient : « Istiqlal ». Les membres de ce dernier signent seuls, et personne d’autre, une pétition dans l’ombre, dans laquelle ils demandent l’indépendance du Maroc ; car c’était la fin prescrite du protectorat ! L’Istiqlal hérite non seulement du nom, mais aussi de papier justificatif et donc la carte de la légitimité est assuré. Un nationalisme acquis à la belote comme j’avais déjà dit !
1947. Allal Elfassi siége à la ligue des états arabes en tant qu’apprenti.
1955. Les accords de La Celle-Saint-Cloud (6 novembre), remettent les clés du Maroc aux bons élèves et aux loyaux protégés.
1956. Il n’y avait pas de constitution à ce moment la, mais ils siégeaient déjà dans la ligue arabe. Le pays ne comptait en son sein pas plus de 11% de sa population qui parle arabe. Quant à son origine, cela est une autre paire de manche ; car les soldats de l’idéologie arabo-musulmane ne sont jamais répertoriés.
1957. Imazighen fondent le mouvement populaire contre le parti unique de l’Istiqlal, sa première assemblée avait lieu à Goulmima ; mais très vite le cadre change et de cape, et de légitimité.
1962. La première constitution, préparée dans la cuisine à Rabat, tombe du ciel sur le peuple Amazigh dans une langue qui ne maîtrise pas et qui n’avait même pas le droit d’être cité dans ses textes ! A cette époque, le chantre Amazigh Sakkou lançait un appel dans l’Izli. Il disait :
Mon appel est lancé à mes concitoyens, s’il y a cohérence
Ne dites surtout pas « oui », à l’habitation insalubre !
Cette date restera gravée, tout de même, à jamais dans les mémoires ; car elle n’est pas comme les autres. C’est ici, que la rhétorique, la trahison, le mensonge, le trafique et le formatage, allaient connaître leur apogée. Jugez-en ? Un peuple sédentaire sur sa propre terre allait dire, soit disant, « oui » à une constitution qui le prive de tous les droits les plus primaires. Il n’y aurait droit ni à la mort, ni à la vie !
1965. Cette date, à Casablanca, allait connaître une suite d’images époustouflantes. Le paradoxe dû à une politique sauvage, met des Imazighens face à face à cause d’une idéologie qui ne les concerne même pas. D’un côté une tranche rebellée de l’Istiqlal, mais toujours d’idéologie arabo-musulmane, en la personne de Chikh Aârab- lire Amazigh ; et de l’autre un Général Amazigh également qui défend le système régi de l’Istiqlal ! Eux les Imazighens, luttaient pour un même idéal : c’est celui d’être Arabe plus que des arabes ! Le comble c’est qu’ils étaient tous les deux d’origine du Maroc dit « inutile ». Allez comprendre quelque chose ?
1971. L’année a connu des événements que personne ne pourrait imaginer auparavant, surtout pas les scénaristes de Hooly-yood. La manipulation de 1965 refait surface. Devant la mémoire d’une figure fascinante, je m’abstiens.
1972. La troisième Constitution imposée en mars, dont une partie sera suspendue en avril. Deuxième tentative de coup d’Etat militaire cette foi-ci, le 16 août, menée par le Général Oufkir qui s’est réveillé tardivement et qui est assassiné le lendemain sans aucun scrupule. L’Amazigh, même serviteur, ne pourrait pas prétendre au rang de concitoyen !
1974. Allal Elfassi meurt à Bucarest en Roumanie. Le poète Amazigh Sakkou dira dans son Izli :
* De toute les peines que j’ai eues durant ma vie
* Seul le « oui » m’est resté au travers de la gorge !
1983. Le parti de l’’Istiqlal infecte le système éducatif et les programmes de l’enseignement du pays. Ce dernier, l’Ighrem Amuqran, allait perdre de toute sa saveur. Pour cause, l’arabisation et l’islamisation à outrance font des ravages dignes des anticyclones. La pensée du pays, dans sa globalité, s’effrite. Les valeurs Amazighes et humaines s’estampent. La norme Marocaine se mue et le désespoir s’affiche. Ils enseignent aux jeunes Amazighs le mensonge dans une langue qu n’est pas la leur. Ils apprennent aux enfants comment insulter leurs propres parents et comment rompre avec leur propre mémoire. Pendant ce temps, quelques personnalités marocaines découvrent enfin qu’elles sont Amazighes !
1986. Le parti de l’Istiqlal accueil au Maroc le parti du panarabisme le Baât, qui finance les mercenaires du polisario. Pendant ce temps, les Imazighen et les marocains en général se battent dans la pampa du Sud dit « le sahara » pour l’intégrité du pays. De mes yeux, j’en ai vu la trahison légalisée !
1994. Le 17/4/1994 avions décidé, nous trois personnes, d’organiser une marche pacifique, dans le respect de la loi et sans aucune offense, avec des banderoles écrites en Amazigh la langue du pays. Le 2/5/1994, la réponse ne s’est faite pas attendre. La police marocaine, dans ses diverses sections a procédé à l’enlèvement et à l’arrestation d’un groupe d’Amazighs, qui malgré la légitimité, la majorité n’était même pas au courant. L’arbitraire et la honte ne font plus rougir. Comment peut-on être contre une langue telle quelle soit ? Il faudrait peut être un animal pour dire que j’ai des droits !
2000. Les Imazighens, venus de l’autre rive pourtant, dressent les manifestes et les communiqués. Les pétitions se suivent et se ressemblent. Tout le monde veut être là ; qui leader, penseur, militant et des fois carrément chef ! Ils excellent tous, ou presque, dans des autres langues autre que la leur. On chasse le naturel et il revient toujours au galop !
2007. Le parti de l’Istiqlal s’affiche cette foi-ci en clair. Il se nourrit, comme à son habitude des troubles, et gagne les élections après que les Imazighens se sont abstenus. Evidemment, cette vérité personne n’en a cure. Mais l’étalage de l’histoire est là ! Abbas Elfassi, descendant de Abdelwahid Elfassi le feqih et père de Allal El fassi, prend les commandes du pouvoir. La relève est non seulement assurée ; mais mieux encore, il prépare Nizar Baraka petit-fils de Allal Elfassi et gendre de l’actuel premier ministre pour faire durer la suite de l’héritage d’une nation. Ils ont monopolisé la parole et s’accaparent la décision pendant un siècle. Maintenant, on connaît le résultat. Tout le monde s’accorde à dire que la situation du pays aujourd’hui est catastrophique sur tous les plans. La responsabilité n’incombe bien entendu qu’à ceux qui décrètent pour nous, et à notre place, notre destinée et le sort qu’ils ont choisi pour nous.
Malgré ce constat amer, les Imazighens ne sont toujours pas sur la même longueur d’onde ; c’est une donne presque banale dirons-nous ? Mais ce qui est injustifiable, ce sont les procédés de certaines personnes délirantes qui sèment à tout va, la calomnie et des propagandes mensongères dans le but de déstabiliser des personnalités Amazighes. Ils accusent les personnes, les associations, les coordinations, et les institutions Amazighes. Pour eux, tout est suspecté ! J’ai vu des cadres associatifs se transformer carrément en une tribune spécialisée dans les procès des absents ; l’idée de la présence de l’ennemi invisible n’est pas aussi loin que ça ! Nous le savons c’est une des meilleurs manières pour s’auto détruire. N’est ce pas la main de l’istiqlal avec des gangs Amazighs ? De mon point de vu, je tire la satisfaction dans le fait que je ne partage rien avec ces gens.
Le sortilège connaît ses foyers !
Zaid Ouchna