Le Mouvement Amazigh ne cesse de marquer le quotidien des Marocains depuis au moins deux années. Il cumule réalisations et revers qui ne peuvent qu’exhorter ses militants à s’engager d’avantage dans l’esprit d’une concertation plus ample quant aux étapes à entreprendre dans le court et moyen terme. Mais, d’abord, voyons déjà ce qui a été réalisé et les encombres qui l’ont opposées.
Le Mouvement Amazigh, à mon sens, a franchi beaucoup d’obstacles dans son itinéraire récent qui avait commencé tard après l’indépendance du pays. Il a su se libérer petit à petit de la coquille hermétique que les nationalistes arabistes ont, avec l’implication volontaire de la France, soigneusement édifiés autour de toutes doléances et aspirations amazighes. Il a également forcé le verrouillage de la scène politique qui dénigre tout ce qui renvoie à l’amazighité. Forcé de répondre aux revendications légitimes des militants amazighs, le pouvoir avait essayé de by-passer la montée des protestations en les cautionnant par un institut makhzenien mais en vain, ce qui n’était pas facile du tout sachant les moyens financiers mis à sa disposition pour faire taire les intègres et acheter ceux qui étaient prêt à monter à son wagon. Le matraquage quotidien que subissaient Imazighen via les moyens de communication officiels n’a pas pu également convaincre les gens que tamazight allait regagner sa place dans une atmosphère de bon enfant par le seul biais des recommandations de l’IRCAM dans l’enseignement et les divers secteurs de la vie publique .Le mouvement amazigh avait aussi entrepris ces deux dernières années beaucoup d’initiatives qui ont fait de lui la seule mouvance pacifique, démocratique et authentique du pays. Ses manifestations incarnent les populations dans le fond du pays loin de toute supercherie idéologique ou pieuse et ses aspirations font vibrer des milliers de gens au rythme de la reconquête de l’identité historique de Tamazgha. Il a également réussi à comptabiliser à son actif, une multitude d’actions désormais devenues indépendantes de tout parti politique ou de la sphère du pouvoir.
Par contre, des défaillances parfois d’ordre organisationnelles ou structurelles ont été remarquées dans l’allure du mouvement amazigh ces dernières années, ce qui avait engendré des pertes d’énergie considérables embrouillées délibérément par le clan makhzenien et ses relais acolytes du service qui noient la scène culturelle par des associations et collectifs qui virevoltent dans son orbite. Hormis l’université où les militants amazighs sont organisés dans le Mouvement Culturel Amazigh, les partisans amazighs n’ont pas à ce jour développé de forme d’organisation ajustée à la réalité du combat pour l’amazighité.
1) Pour une lueur des idéaux du Mouvement Amazigh.
Il est certain que la réussite d’un mouvement est fonction des idéaux qu’il symbolise et des aspirations et ambitions de ses membres, une lucidité intellectuelle et une réflexion idéologique unanime sont ses points forts. Le M.A, à ma connaissance, n’a pas encore élaboré de positions péremptoires quant, aux systèmes politiques en place, à la religion et au modèle de sociétés espérés.
a- Organisation politique :
Imazighen, à travers leur histoire, n’ont connu d’autre forme de gouvernances que l’organisation politique sous forme de fédération de tribus dirigées par un Agellid (roi) ; les bribes d’histoires des anciens chroniqueurs nous rapportent que durant des siècles, Imazighen ont développé des systèmes de gouvernance qui n’ont rien à envier aux méthodes des démocraties contemporaines, à savoir l’existence de structures élues qui tranchaient dans les affaires de la guerre comme celles de la paix.
Il est certain que les temps ont évolué et que l’humanité a produit des formes de gouvernance plus commodes aux réalités d’aujourd’hui, mais nous devons lutter pour instaurer des configurations harmonieuses de démocratie constitutionnelle sans dérogations ni faiblesse vis-à-vis d’une monarchie d’ici ou d’une république d’ailleurs.
Monarchie ou république, la démocratie accomplie par le scrutin demeure la seule source de légitimité et seule devise acceptable dans la gestion des affaires de l’Etat. Elle ne peut être issue d’autre chose que de la souveraineté du peuple exprimée par des élections et une constitution votée.
b- L’autonomie des régions amazighes :
Dans la configuration des choses actuelles, la lutte pour la perpétuité de l’essence et de l’identité amazighes ne peut que se heurter à une arrogance accentuée des pouvoirs arabistes en place. Je suis désormais convaincu qu’une étape qui passe par l’autonomie des régions amazighophones s’impose. C’est devenu impératif et primordial d’entretenir notre identité en lui offrant toute les possibilités de progrès et de prospérité mais loin de tout enclavement, ce qui ne peut pas voir le jour dans le contexte actuel, vu sa situation en tant que langue et patrimoine dominés.
Cependant, il est de l’intérêt de tous Imazighen, de garder une cohésion de leurs réclamations et des relations étroites susceptibles de maintenir haut le toit de leurs doléances.
c- Le Sahara un contentieux qui alimente un litige chimérique :
Les pouvoirs en place à Tamazgha ne cachent pas qu’ils tirent profit de la situation du statu quo actuel au niveau du Sahara convoité par les puissances régionales. Nous Imazighen, devons ne pas voir d’issue à ce contentieux inventé loin de l’amazighité du pays tout entier et refusons que sur nos terres historiques soit érigée une république fantoche et arabe en plus.
Le Sahara, pays historique des Amazighs, doit bénéficier comme d’autres régions, d’une autonomie régionale qui n’expulse aucun de ses enfants, et qui garantie la liberté à toutes ses entités et en premier lieu Ait Baamrane tribu martyre du Sahara.
d- Ni autocrates ni conciliants du doute :
L’histoire des autres nations a démontré que l’évolution vers un Etat de droit où prospère la liberté d’expression et de culte, ne pourra se réaliser dans des autocraties dirigées par des mollahs qui assimilent l’existence humaine à la seule tache de vénérer Dieu. Comme il ne le pourra pas dans un pays où règne l’anarchie et manque aucun rangement social sur des valeurs qui respectent la croyance des gens et évitent de chosifier l’être humain en l’assimilant à une marchandise. Nous devons alors lutter pour une société séculière et un Etat laïc où se respecte le droit de chacun à choisir ses croyances. Ceci dit, il en découle que la religion et l’Islam en particulier n’est pas vraisemblablement la bête noire de l’amazighité du pays.
Il est incontestable que les mouvances islamistes, toutes tendances confondues déclarent une opposition à l’unanimité aux aspirations des Amazighs de voir leur identité prendre la place qui lui revient dans la société, mais ceci ne doit pas nous dévier de la bataille principale et d’escrimer des franges amples de la société qui incarnent la foi de l’islam qui n’est pas d’ailleurs celle que ces barbus défendent.
A mon sens, il faut en finir avec ce doute qui parfois embrouillant, persistant et confondant militantisme amazigh à un esprit voluptueux et libertin. Nous devrons admettre qu’on peut être fervent défenseur de l’amazighité et en même temps opter pour la conviction religieuse préférée : l’Islam par exemple, tout simplement parce que la religion est un choix personnel et personnifié, mais admettant qu’elle ne soit ni synonyme de domination politique ou linguistique ni source de zizanie et d’appel à dénigrer son rôle dans la société.
e- Position vis-à-vis des partis politiques :
Nous devons être clairs dès le début et avancer qu’a tort celui qui croit en une disparité de position quelconque entre les différents partis politiques reconnus, comme ceux qui ne le sont pas d’ailleurs , vis-à-vis de la cause amazighe. Tous, ils manifestent un souhait d’assimiler les doléances des Amazighs à un mouvement contre historique et bafouent tout simplement l’amazighité du pays dans leurs pseudos programmes et la renvoient à un simple folklore qu’il faut entretenir pour le décors culturels désiré par les intervenants du tourisme.
Il faut leur faire barrage tous, boycotter leur boutiques politiques et appeler tous Imazighen à déserter leurs rangs, décrédibiliser leurs discours mensongers toutefois possible et leur faire face dans l’université, les syndicats, les forums et dans la rue.
2) Pour une forme d’organisation démocratique et claire :
Sans recourir à une organisation adéquate plus développée, les efforts fournis par le mouvement amazigh finiront par se perde dans les labyrinthes de la lutte acharnée entre projets de société, à citer celui des islamistes qui rêvent d’un Etat-Oumma qui n’a jamais existé, celui des arabistes toutes nuances confondues sans réelles caractéristiques à part l’élimination de tamazight et enfin celui du pouvoir qui semble dominer dans le contexte actuel.
Un collectif d’organisations populaires doit aboutir à la formation d’un front solidaire qui regroupera tous ceux qui ne se retrouvent pas dans les modèles cités. Ce front doit bien sûr déclarer ses intentions mais aussi partager la tâche entre ceux qui doivent militer politiquement sous une forme de partis qui pourrait ne pas prendre de connotation amazighe mais sans être obligé de participer au jeu politique instauré et verrouillé par les lois en vigueur, et d’autres qui continueront à exercer un pressing tout en rejetant toute casquette politique divulguée.